Dans le cadre du projet « Nashiriki kwa Masikilizano » ou cohésion sociale, Search for common Ground multiplie la série d’activités de solidarité communautaire pour la guérison de traumatisme. Marabo, une entité de la chefferie de Mobala en territoire d’Irumu et Tchomia, important centre de la chefferie de Bahema Banywagi en territoire de Djugu, ont respectivement acceuilli ces séances, les 15 et 18 avril 2023.
Des activités qui, visiblement, ont sensiblement contribué à améliorer les relations et le rapprochement entre les membres de la communauté, qui ont participé aux séances de guérison de traumatisme. Au total, 240 participants, dont 100 à Marabo et 140 à Tchomia, y ont pris part.
« Depuis que nous avons passé des évènements malheureux (guerre), nous ne savions pas si un jour ce traumatisme devrait disparaître », a expliqué un participant, au sortir de cette activité à Marabo, le 15 avril. Pour lui, quasiment toutes les couches sociales en territoire d’Irumu ont des traumatismes. D’où son plaidoyer : « Je souhaiterais que Search, dans le prochain jour, rassemble toutes les communautés du territoire d’Irumu ».
Toujours à Marabo, un jeune homme a partagé son expérience. L’activité de guérison de traumatisme lui a permis, selon ses mots, à pardonner et à entretenir une bonne collaboration ses proches.
« J’ai été traumatisé après la mort de mon grand frère. Il était celui qui m’a beaucoup aidé dans ma vie. Quelques temps après, mon propre fils est aussi mort. Il a été tabassé par un autre enfant (…). Le dossier a été amené auprès du chef de localité. Malgré ses conseils, je n’ai pas voulu céder et pardonner. J’avais décidé d’amener le dossier au niveau supérieur (territoire) », explique-t-il avant d’ajouter « chaque deux semaines, je tombais malade, suite à ce traumatisme. Quand nous avons commencé à suivre la formation sur le traumatisme, je me trouve déjà à l’aise. J’avais décidé de pardonner », rapporte-t-it.
L’autorité coutumière de cette partie de l’Ituri a aussi, comme d’autres participants, salué vivement cette initiative du consortium « Nashiriki kwa Masikilizano », à travers Search for common Ground. « Ça nous fait beaucoup de plaisirs. Vous savez que Marabo-Nyakunde, c’est un champ de bataille… 89% de la population sont traumatisées. Une population qui a besoin d’une aide, tel qu’on vient de recevoir aujourd’hui », a indiqué Jean-Pierre Lemabo, chef de chefferie de Mobala. Pour lui, au-delà de la population civile, cette activité doit aussi cibler des militaires qui, selon lui, sont aussi traumatisés suite à la guerre. « Nous, on avait souhaité que les gens qui sont formés, aillent même jusqu’aux militaires, parce qu’eux aussi sont traumatisés. C’est presque tout le monde qui est traumatisé ici », a-t-il souhaité.
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Le projet « Nashiriki kwa Masikilizano », exécuté par le consortium Search for common Ground, Justice Plus, Alert International et NRC, bénéficie de l’appui financier de l’Union européenne. Dans son deuxième pilier qui est celui de favoriser la cohabitation pacifique entre les membres des communautés, « il prévoit qu’après 3 mois, qu’on puisse organiser une activité de solidarité communautaire pour la guérison de traumatisme, qui réunit tous les participants aux séances de guérison de traumatisme », a souligné Jimmy Faliala, Officier projet Guérison de traumatisme à base communautaire (CBTH) de Search.
Expliquant l’un des objectifs de cette activité de solidarité communautaire pour la guérison de traumatisme, monsieur Jimmy a renseigné que : « Nous, nous pensons que, la meilleure façon de gérer les conflits, la meilleure façon de guérir de ce traumatisme, c’est d’apporter des attitudes collaboratives. Et pour y arriver, il faut développer certaines compétences telles que l’écoute active, empathie, la confiance, mais aussi il faut que les gens arrivent à éviter les préjugés », a-t-il révélé.
Les villages ciblés pour cette activité en territoire d’Irumu sont notamment Komanda, Marabo, Irumu centre, Nyakunde, Sota, Bogoro, Gety, Aveba, Baviba, Kasenyi. À Djugu, il s’agit entre autres de : Iga-Barrière, Jina, Lopa, Masumbuko, Blukwa, Pimbo, Djugu centre, Fataki, Djaiba, Libi, Bule et Kpandroma.
D’autres témoignages poignants
« En 2003, j’ai été violée par 5 militaires … De ce viol, j’ai eu un enfant. Quand je me suis remariée, j’ai eu deux autres enfants avec mon mari. Mais dans le foyer, mon mari déconsidéré mon enfant issu du viol. Il me disait toujours que j’aille chercher son père. À chaque fois que je me croise avec des militaires en route, j’ai trop peur et je fonds en larmes », raconte une jeune femme, larmes aux yeux, en pleine séance de solidarité communautaire pour la guérison de traumatisme à Tchomia, entité de la chefferie de Bahema Banywagi.
Au cours de cette activité, le mardi 18 avril 2023, la même femme, victime des violences sexuelles, a poursuivi son triste témoignage, transformé à une guérison de traumatisme.
« Il y a un papa du nom d’Isaac et une maman du nom de Zawadi, qui étaient en pleine sensibilisation communautaire. En écoutant leurs messages, j’ai partagé mon cauchemar quotidien. Ces sensibilisateurs m’ont convié à prendre part à une formation qui m’a beaucoup aidé. De mon côté, je remercie sincèrement Search for common Ground. Merci d’avoir formé ces gens. Grâce à vous, mes peines ont été transformées en joie. Mon traumatisme a disparu », a conclu cette survivante de la violence sexuelle.
Toujours à Tchomia, entité située à près de 60 kilomètres de la ville de Bunia, chef-lieu de la province de l’Ituri, d’autres témoignages ont été avancés.
« Après la mort de mon défunt mari, mes jours et mes nuits étaient devenus sombres. Chaque fois, j’étais hospitalisée. Aujourd’hui, je remercie Dieu et je remercie Search. Un jour, une équipe de sensibilisation est passée chez moi à la maison. Je leur ai expliqué les raisons de mon traumatisme. Ces personnes m’ont demandé de venir participer à une formation de 3 jours. Au sortir de cette formation, j’ai été soulagé. J’ai guéri de mon traumatisme. Des activités récréatives m’ont aussi beaucoup aidé », a partagé une autre femme, ayant perdu son mari et vivant jadis dans un profond traumatisme.
Dans la série de témoignages, un jeune homme a révélé que sa vie a changé. « Grâce à Search, j’ai compris que face à un problème, il faut toujours chercher à dialoguer. Aujourd’hui, même mon ennemi, je le vois comme un ami », a-t-il soutenu.
L’autorité locale n’a pas été du reste. « Au nom de notre chefferie, nous remercions sincèrement Search d’avoir contribué à la résolution des problèmes de traumatisme dans notre société », a indiqué Jérémie, représentant le chef de la chefferie de Bahema Banywagi, Monsieur Bidjo Panga Mandro Freddy.
« Nous demandons à Sarch de poursuivre ce genre de projet, car beaucoup d’autres personnes continuent à souffrir de traumatisme. Que ceux qui ont bénéficié de cette formation puisse pérenniser les séances », a-t-il plaidé au micro de buniaactualite.cd.
Avant ces activités, Search for common Ground a eu a organisé aussi, dans le passé, d’autres activités similaires dans d’autres entités de la province de l’Ituri.
Moïse Mugisa