Installée à Kinshasa, Pétronille Waweka est l’autre face de l’Ituri, cette province étiquetée à tort ou à raison, terre à histoire tumultueuse. Vendredi 8 décembre 2023, elle inscrit son nom sur une prestigieuse page de l’histoire dans le monde.
La responsable du Centre des femmes engagées pour la paix en Afrique (FEPA), cette Iturienne a remporté vendredi à Kinshasa, le prix « Women Building Peace » 2023 décerné par l’Institut américain pour la paix qui honore des femmes extraordinairement engagées, dirigeantes et ayant un impact qui travaillent à construire la paix et à résoudre des conflits dans leurs communautés.
La résolution des conflits et la recherche de la paix, des atouts pour la « courageuse » et « déterminante » Pétronille, députée de transition de 2004 à 2008.
“ Si j’ai gagné, ça sera un cadeau pour la RDC, pour les femmes, pour les filles et aussi pour les hommes, ces gens de la base qui se battent et veulent changer quelque chose dans ce pays ”, déclarait-elle à la veille à nos confrères de TV5 Monde Afrique. C’est un rêve devenue une réalité.
« J’aurais aimé que cette reconnaissance me vienne de mon pays »
Née le 18 novembre 1948 à Bunia, chef-lieu de l’Ituri, Mme Vaweka, mère de six enfants, ancienne enseignante puis journaliste notamment à la Radio Candip a œuvré pendant plus de 20 ans dans la recherche de la paix. Un combat « non vu » par son pays pour qui elle blanchie la page de l’histoire.
“J’aurais aimé que cette reconnaissance me vienne de mon pays où j’ai beaucoup travaillé. Mais comme nous n’avons pas la culture de la méritocratie, voilà que ça vient de loin pour que mes sacrifices soient reconnus ”, déclare-t-elle dans une interview accordée à buniaactualite.cd ce samedi 09 décembre 2023.
Ce prix qui « n’est pas un cadeau mais le résultat d’un travail acharné », rayonne sur la RDC et surtout l’Ituri, sa province « qui est maintenant au niveau mondial ».
Pétronille Vaweka : un pas franchi mais une destination reste à atteindre
Présidente de l’assemblée spéciale intérimaire, Mme Vaweka a su mettre son talent au service de sa province. Considérant l’Ituri comme un volcan où l’éruption peut avoir lieu à tout moment, elle regrette que les acquis de la paix ne soient pas consolidés.
Sur le haut d’un Ituri pacifié en 2008, elle est persuadée que les rêves d’aujourd’hui seront les réalités de demain si « chacun apporte sa pierre à l’édifice ».
Ituri, dans l’ombre de soi-même
L’Ituri est en train de s’oublier soi-même, d’oublier son histoire, c’est qui consistue un regret pour Pétronille Vaweka qui pense que le blocage pour le décollage du nouveau Ituri est « dans le cœur des Ituriens » eux-mêmes.
“ La responsabilité lui incombe. Tant qu’il n’y a pas cette conscience de construire un Ituri Uni, il n’y aura pas la paix ”, pense celle qui montre aux yeux du monde « l’autre face de l’Ituri ».
À Aru en Juin 2023, Vaweka est présente dans le dialogue intergroupes armés. En sa présence, FRPI, FPIC, URDPC/CODECO et MAPI, quatre des groupes armés locaux opérant en Ituri signent, le jeudi 1er juin 2023, un protocole d’accord au chef-lieu du territoire d’Aru. Une feuille de route qui finalement, selon elle, manque une mesure d’accompagnement.
“ Un accord oui, mais c’est le début. Qui accompagne les groupes armés pour qu’ils arrivent à respecter leurs engagements ?
Le processus de paix, c’est dans l’infini. On ne l’arrête jamais. On doit avoir le suivi, évaluation à chaque étape ”, a-t-elle martelé.
« Personne n’est trop petit pour avoir un impact et changer le monde », cependant elle veut l’implication de tous, au-delà du gouvernement congolais. “ Comme nous l’avons déjà fait dans le passé ce que nous pouvons le refaire ”, conclut cette femme iturienne au parcours élogieux.
Avec cette distinction au niveau mondial, Pétronille Vaweka brise un plafond majeur pour l’Ituri peu médiatisée sur la scène internationale malgré ce qui s’y passe. Cette récompense essuie, peut-être d’une manière à une autre, les larmes de la RDC qui s’est retrouvée hors de la liste Forbes des 100 femmes les plus puissantes du monde en 2023.
Verite Johnson