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    « Yo nani, oboya Luboya ? » (« Qui est-ce, si ce n’est Luboya ? »). Plus de trois ans après son accession au pouvoir, des ituriens témoignent encore leur admiration au gouverneur de province qui a marqué d’une empreinte indélébile la province. Le 23 novembre 2024, alors que les autorités provinciales accueillaient la Première ministre à l’aéroport de Murongo, une partie de la foule a préféré entonner des chants en l’honneur de Luboya N’kashama, chef de l’exécutif provincial.

    Pourtant, derrière cette admiration palpable, d’autres voix s’élèvent pour critiquer celui qu’ils considèrent comme « celui qui a échoué à restaurer l’autorité de l’État ».

    En Ituri, Luboya N’kashama incarne une figure polarisante, oscillant entre adulation et rejet. Si certains saluent son leadership et ses initiatives, d’autres réclament la fin de son régime, pointant du doigt la persistance d’une situation sécuritaire précaire. Bien que des progrès aient été enregistrés, le bilan en matière de sécurité reste en deçà des attentes de nombreux Ituriens selon les uns, créant un clivage au sein de la société. Malgré ces divisions, une réalité demeure : Luboya N’kashama est toujours l’homme fort de l’Ituri, un leader dont la présence s’impose tant par son charisme que par son autorité.

    Un leadership aux multiples facettes

    Au chef-lieu de la province, Luboya N’kashama est un homme de terrain, capable de se mêler à la population lors de ses joggings chaque week-end. Il sait soutenir les initiatives qu’il juge bénéfiques, tout en n’hésitant pas à dire non lorsque nécessaire. Son franc-parler et sa capacité à lancer des piques à l’encontre de son prédécesseur, lorsqu’il en a l’occasion, font de lui une figure à la fois respectée et crainte. Sous son administration, la mobilisation des recettes provinciales a connu une croissance notable, bien que cette période ait également été marquée par des remplacements et des arrestations au sein de la direction générale des recettes de la province.

    Luboya, le couteau suisse de l’Ituri ?

    Doté d’un mandat centré sur le rétablissement de la sécurité en Ituri, Luboya N’kashama cumule les rôles de commandant des opérations sous état de siège et de chef de l’exécutif provincial. Ce double statut lui confère un pouvoir exorbitant, qu’il a su exploiter pour impulser des actions de développement tout en maintenant un contrôle ferme sur la province. Militaire de carrière et général trois étoiles, Luboya incarne une autorité qui inspire autant le respect que la crainte. Sa capacité à naviguer entre ces deux extrêmes, à lire entre les lignes et à maintenir un équilibre précaire, témoigne d’un sens politique aiguisé.

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    Cependant, son parcours n’est pas sans controverse. En octobre 2024, Luboya a fait l’objet de deux plaintes déposées contre lui, notamment par le député national Iracan Unen Gratien de Saint-Nicolas, élu de Bunia. Les accusations portées contre lui – outrage à un député national, diffamation, propagation de fausses rumeurs…– ont jeté une ombre sur son image publique. Malgré ces turbulences, Luboya semble imperturbable, continuant à poursuivre sa vision d’une Ituri unie, pacifique et développée.

    Un héritage en devenir

    Plus de trois ans après la proclamation de l’état de siège, Luboya N’kashama n’a plus besoin de présentation en Ituri. Son empreinte sur la province est indéniable, bien que son héritage reste contrasté. La situation sécuritaire au Nord-Kivu, marquée par l’agression rwandaise et les activités des groupes terroristes du M23, a visiblement affecté ses plans opérationnels en Ituri, compliquant davantage sa mission d’une part.

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    Luboya N’kashama incarne ainsi une figure complexe, à la fois adulée et redoutée. Homme de conviction visiblement, il s’exprime avec l’assurance de celui qui semble bien avoir la maîtrise de son terrain. Pourtant, la réalisation de sa vision pour l’Ituri dépendra de sa capacité à fédérer les forces vives de la province et à surmonter les défis persistants. Dans un contexte marqué par la division et l’incertitude, Luboya reste un leader dont l’histoire, encore en cours d’écriture, continuera de susciter débats et passions.

    Verite Johnson

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