Le 24 mai 2025, le village de Tsere, à proximité de Bunia, chef-lieu de la province de l’Ituri, a été le théâtre d’une cérémonie majeure dans le processus de paix et de stabilisation de l’Est de la République Démocratique du Congo : le lancement officiel du projet de réinsertion des combattants démobilisés à Mabanga. Un événement fort en symboles, mais aussi en chiffres, qui interroge sur la capacité de la province à transformer l’essai de la démobilisation en véritable réintégration.
Un premier bilan impressionnant
À ce jour, l’Ituri se positionne en tête des provinces où le Programme de Désarmement, Démobilisation, Relèvement Communautaire et Stabilisation (P-DDRCS) est pleinement opérationnel. Selon les données communiquées lors de la cérémonie, on dénombre :
1 499 combattants désarmés, dont 1 434 déjà démobilisés ;
258 armes à feu récupérées ;
4 582 munitions saisies ;
1 426 enfants retirés des groupes armés et confiés aux structures de protection.
Des chiffres impressionnants, surtout dans un contexte sécuritaire encore instable. Ils traduisent l’engagement ferme du P-DDRCS, du gouvernement de l’état de siège, représenté ce jour-là par le Général Bozene Jean Roger, commandant second de la 32e région militaire.
Une nouvelle étape : la réinsertion communautaire
Désarmer ne suffit pas. Tel est le message central du Professeur Jean de Dieu Désiré Ntanga Ntita, Coordonnateur National du P-DDRCS, qui voit dans la réinsertion une étape cruciale pour rompre définitivement avec le cycle de violence.
« Le désarmement ne peut être dissocié du développement, la démobilisation n’a de sens que si elle est suivie d’un enracinement dans la communauté. »
Le projet de Mabanga ne se limite pas à offrir un nouveau départ, il vise à reconstruire une identité citoyenne et économique pour les anciens combattants. Une première cohorte de 48 bénéficiaires, parmi lesquels 16 ex-combattants du groupe Zaïre et 32 jeunes à risque issus des communautés locales, participe à ce projet pilote innovant.
Une approche intégrée et durable
Le projet repose sur une combinaison d’interventions concrètes et structurantes :
Élevage bovin pour générer des revenus immédiats ; travaux communautaires à haute intensité de main-d’œuvre ; construction d’un marché rural ; accompagnement psychosocial et formation en droits humains et en valeurs citoyennes.
Les bénéficiaires ont déjà reçu leurs premières vaches, symbole de stabilité économique et d’autonomisation. Leur satisfaction est palpable, et leurs témoignages soulignent l’espoir d’une reconstruction réussie.
Si le bilan initial est prometteur, des défis demeurent : garantir la bonne gestion des fonds, assurer la pérennité des activités génératrices de revenus, et convaincre les combattants encore actifs de suivre cette voie.
Le Coordonnateur principal de la MONUSCO DDRCS, Khaled, a lancé un appel fort : « La paix ne va pas tomber du ciel. Vous allez la faire vous-mêmes »
Pari réussi ou défi à venir ?
Le projet de Mabanga montre que la paix est possible, mais fragile. Il marque un tournant dans la gestion des ex-combattants, en misant sur l’inclusion, la dignité et l’économie communautaire. Cependant, la route vers une paix durable reste semée d’embûches. La réussite du projet dépendra de la continuité des financements, de la transparence dans la mise en œuvre, et de la participation active des communautés locales.
Rédaction