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    La Convention pour la Révolution Populaire (CRP), mouvement politico-militaire lancé en janvier 2025 par Thomas Lubanga Dyilo, traverse une crise interne profonde. Cinq de ses cadres fondateurs, dont le premier vice-président Charles Bungamuzi Kakani, ont annoncé samedi 18 octobre à Kampala, en Ouganda, leur démission collective. Ils évoquent une série de dérives qui, selon eux, minent le fonctionnement du mouvement.

    Dans une déclaration parvenue à buniaactualite.cd, les dissidents accusent Thomas Lubanga d’une gestion « autocratique et clanique », marquée par un manque de transparence et une instrumentalisation économique du conflit en Ituri. Ils affirment que le chef de la CRP solliciterait des contributions financières auprès de certains opérateurs économiques sous prétexte de financer « l’effort de guerre », sans en rendre compte.

     « Depuis la création du mouvement, aucune vision claire n’a été définie. Il n’y a ni inclusion, ni transparence, seulement un repli sur un cercle restreint à visée tribale », a déclaré l’un des signataires de la lettre de démission.

    Ces anciens dirigeants appellent désormais la population de l’Ituri à se désolidariser de la CRP, estimant que ce mouvement, loin de pacifier la province, contribue plutôt à entretenir la méfiance et les tensions communautaires.

    Des accusations lourdes de conséquences

    L’activiste politique Luc Malembe a, lui aussi, réagi à cette crise, parlant d’un « éclatement prévisible » du mouvement. Selon lui, les motivations de la CRP n’ont jamais été politiques ni sociales, mais avant tout financières. Il évoque notamment des pratiques de tracasserie sur la route nationale numéro 27 et des activités illégales autour du lac Albert, qui auraient rapporté plusieurs millions de dollars.

    « Depuis le début, j’ai dit que cette aventure allait échouer. On ne peut pas résoudre le problème des milices en créant une autre milice », a déclaré Malembe. Il ajoute que Thomas Lubanga aurait « accaparé les revenus issus de ces activités », provoquant ainsi la rupture avec ses cofondateurs.

    Selon ses révélations, le leader de la CRP aurait perçu près de quatre millions de dollars, utilisés notamment pour l’achat de propriétés à Bunia, Kinshasa et Kampala. Des allégations qu’aucune source indépendante n’a, pour l’heure, confirmées.

    Un passé lourd de symboles

    Figure bien connue en Ituri, Thomas Lubanga Dyilo n’en est pas à sa première controverse. Ancien chef de l’Union des patriotes congolais (UPC) au début des années 2000, il avait été condamné en 2012 par la Cour pénale internationale (CPI) à 14 ans de prison pour enrôlement d’enfants soldats dans le conflit de l’Ituri. Libéré en 2020, il était resté discret avant d’annoncer, début 2025, la création de la CRP, présentée comme un mouvement visant à « défendre les intérêts du peuple de l’Ituri ».

    Mais dans un contexte encore fragile, marqué par la présence des ADF et d’autres groupes armés dans le territoire de Djugu, la multiplication de mouvements politico-militaires inquiète les observateurs. Pour beaucoup, cette fragmentation ne fait que retarder le retour à une paix durable dans la province.

    Alors que la CRP semble vaciller, la population iturienne, déjà éprouvée par des décennies de violence, attend des réponses claires. Entre accusations de corruption, divisions internes et soupçons d’enrichissement personnel, le mouvement de Thomas Lubanga apparaît aujourd’hui à la croisée des chemins.

    Rédaction

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