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    La quiétude apparente du quartier Sayo, niché en périphérie de Beni, cache une réalité bien plus sombre. Depuis l’année dernière, les 20 000 habitants de ce coin paisible vivent dans l’angoisse. Des hommes armés non identifiés patrouillent dans leurs rues, se présentant comme protecteurs. Wazalendo, Maï-Maï, ou un nouveau groupe obscur ? L’identité de ces hommes reste floue, mais leur présence coïncide avec une montée de la criminalité, semant la peur bien au-delà de Sayo.

    Cette nouvelle source d’inquiétude vient raviver les douloureux souvenirs laissés par les Forces Démocratiques Alliées (ADF), bien implantées dans les forêts et les champs qui bordent Sayo. Les habitants n’ont pas oublié l’horreur d’avril 2024, où une soixantaine de vies ont été fauchées. Il y a à peine un mois, un officier de police congolais tombait sous les balles dans la même zone.

    Face à cette spirale d’insécurité, les habitants de Sayo ont tourné leurs espoirs vers la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la Stabilisation en République Démocratique du Congo (MONUSCO). Le vendredi 11 avril 2025, une délégation du sous-bureau de la MONUSCO à Beni s’est rendue sur place pour écouter les doléances de la population et évaluer l’aide à apporter.

    « Depuis l’année passée, notre quartier a été martyrisé par les atrocités des ADF, avec le massacre de plus de soixante civils », a rappelé Amani Kambale, figure de la société civile locale. « Les inquiétudes sécuritaires persistent, et c’est pourquoi nous avons sollicité l’appui de la MONUSCO aux côtés de nos forces de sécurité, la police et les FARDC, pour renforcer notre protection et permettre aux gens de retourner cultiver leurs champs et retrouver leurs maisons ».

    L’aide espérée par les habitants de Sayo est multiple. Outre un soutien logistique et en renseignements aux forces de sécurité congolaises, ils soulignent l’urgence d’améliorer l’accessibilité de certaines zones du quartier, dont les routes impraticables pourraient entraver une intervention rapide en cas d’attaque.

    Bienvenue Kavira, une habitante du quartier, insiste sur cet aspect crucial : « Notre premier grand problème, c’est l’état des routes. Si la MONUSCO ou l’armée doivent intervenir en urgence lors d’une incursion ennemie, cela prendra du temps à cause du mauvais état des routes ».

    Les échanges entre la délégation de la MONUSCO, les autorités locales, les leaders communautaires et les représentants des forces de sécurité ont été constructifs. L’objectif est clair : analyser en profondeur la menace des groupes armés et envisager des solutions concrètes, y compris l’éventuelle installation d’une base de la MONUSCO à Sayo.

    Jean Vaitsura Kima, chef de quartier adjoint, voit dans cette perspective un gage de sécurité pour les civils : « Nous remercions sincèrement la MONUSCO pour sa visite et son engagement pour la paix dans notre ville et particulièrement à Sayo. C’est une grande reconnaissance pour nous. Quand la paix reviendra, les gens pourront enfin vivre normalement. Nous avons convenu que lundi, ils viendront visiter le site où la MONUSCO, les FARDC et la PNC s’installeront ensemble. Ils partageront le même espace et les patrouilles seront toujours mixtes ».

    Au-delà de la présence des groupes armés, les discussions ont mis en lumière d’autres défis majeurs pour Sayo, notamment le chômage des jeunes. Un terreau fertile, selon les habitants, pour le recrutement par les groupes armés ou la délinquance.

    « Beaucoup de jeunes sombrent dans l’alcool par manque de travail », déplore l’adjoint au chef de quartier. « S’ils avaient des emplois, ils resteraient ici, travailleraient, et n’auraient plus l’idée d’aller dans la brousse rejoindre ces groupes ».

    Bienvenue Kavira renchérit : « Les mamans aussi n’ont pas de travail. Beaucoup boivent à cause de la peur et de la situation difficile. Les jeunes volent du cacao par manque d’emploi. Nous demandons à la MONUSCO d’aider les femmes à apprendre la couture et les garçons la menuiserie. Cela aiderait à réduire le chômage ici ».

    Un point positif a émergé de ces échanges : la population de Sayo a reconnu avoir été victime de désinformation par le passé, nourrissant une perception négative de la MONUSCO. Aujourd’hui, ils se disent prêts à collaborer pleinement avec la mission onusienne pour assurer leur propre sécurité.

    La visite de la MONUSCO à Sayo est un signe d’espoir pour une population éprouvée. Reste à traduire ces discussions en actions concrètes pour apporter une protection durable et s’attaquer aux racines de l’insécurité dans ce quartier de Beni.

    Avec PIO Monusco Beni

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